3 - HISTOIRE DE SAND

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Née en 1980 à Marseille, j’ai grandi principalement dans le Vaucluse où ma famille s’était installée lorsque j’avais 2 ans. Je n’ai presque pas de souvenirs d’enfance, hormis quelques rares photos qui me rappellent ces moments-là. Occasionnellement, quelques bribes de mémoire me reviennent, comme la fois où ma mère Cathy m’a menée le premier jour à la garderie d’enfants. À cette époque, je devais avoir à peu près 4 ans ; je me revois agenouillée, tenant dans mes menottes les barreaux verts de l’enceinte de la cour à travers lesquels j’essayais de passer ma tête. Je hurlai, la suppliant de ne pas me laisser. Pour la toute première fois, je ressentis l’insoutenable frayeur de l’abandon et de la trahison. Ce jour-là, une empreinte indélébile marqua en mon cœur d’enfant un véritable déchirement.

 

(Relevons ici le prénom Cathy qui, dans l’histoire de Jenaël, fut également un indice lié à son premier traumatisme de séparation.)

 

Ce n’est que beaucoup plus tard que refit surface cet événement a priori mineur qui a marqué ma petite enfance. Cette épreuve émotionnellement intense me liait évidemment à ma mère mais également, d’une certaine manière, à une autre femme que j’ai reconnue plus tard comme étant ma mère dans “une vie cathare”. L’abandon et la trahison constituaient les deux clés qui allaient raviver mon processus karmique.

Par la suite, d’autres aventures bien étranges ont jalonné mon enfance. Elles étaient les préludes à des prises de conscience qui, elles aussi, se sont révélées bien plus tard lorsque je fus capable de les comprendre. Certains détails relatés s’avéreront d’une importance capitale dans mon cheminement d’adulte.

 

 

Étranges visions

 

Je me souviens d’une vision qui, longtemps, a perturbé mes pensées. Ma sœur était inscrite au catéchisme et avait appris à prier. Un soir, comme à son habitude avant d’aller se coucher, elle pria avec ferveur au pied de son lit. Quelque chose m’incitait à l’observer durant son curieux rituel. À un moment, elle tourna la tête dans ma direction, mais au lieu d’apercevoir son visage familier, j’entraperçus celui d’une sorte de démon ! Du moins à cette époque, je l’interprétai comme tel. Pétrifiée de peur, je bondis dans mon lit pour me réfugier sous la couette. 

 

Un autre incident du même acabit survint environ un an après et me troubla particulièrement. Aux alentours de 7 ans, mes parents m’autorisèrent à dormir chez une copine d’école. En pleine nuit, quelque chose m’extirpa brutalement de mon sommeil. Tremblante de peur, je scrutai la pénombre de la chambre. Je vis alors apparaître dans l’encadrement de la porte qui menait à la salle de bain, une très grande silhouette ; un personnage étrange au crâne complètement lisse s’y profilait. J’ai alors hurlé de toutes mes forces en appelant au secours : “Il y a quelqu’un dans la chambre ! Il y a quelqu’un dans la chambre !”

 

Alertés par mes cris, les parents de ma copine allumèrent la lumière et se précipitèrent à mon chevet. Mais il n’y avait plus personne dans la pièce, le grand chauve avait disparu ! Persuadés que j’avais fait un mauvais rêve, ils essayèrent de me rassurer, en vain. Inconsolable, car convaincue de ce que j’avais vu, je réclamai mes parents qui, en plein milieu de la nuit, vinrent alors me récupérer.

 

(Ces deux événements marquèrent mes premiers contacts avec des êtres venus d’ailleurs.)

 

 

Le départ de Cathy, ma mère

 

Quelque temps après, nous déménagions au pied du Luberon. Mes parents avaient investi toutes leurs économies dans la gérance d’un bar-tabac-restaurant. Deux ans durant, ils bataillèrent courageusement pour tenir leur commerce. Un beau jour, alors que je n’avais que 9 ans, sans crier gare, ma mère Cathy quitta la maison, nous laissant ma sœur aînée et moi à la charge de mon père. J’ignorai totalement la raison de son départ précipité. Durant près d’une année, elle fut totalement absente de ma vie. Les premiers jours, je ne me suis pas vraiment rendu compte qu’elle était partie, d’autant plus que mon père restait muet à ce sujet. “Où était-elle allée ? Que lui était-il arrivé ?” me demandais-je. Mais au lieu d’être triste d’avoir perdu ma mère, je savais au fond que cela devait en être ainsi. J’allais enfin pouvoir reprendre ma place ! 

 

(À ce moment-là, ma réaction en tant que petite fille briguant le rôle de sa mère, constituait un nouvel indice qui devait me permettre de déceler un jeu karmique.)

 

En son absence, notre quotidien devint synonyme de survie. Je devrais même dire que ma vie débuta véritablement à ce moment-là, lorsqu’il me fallut quitter brutalement mon “costume” d’enfant pour endosser celui d’adulte. 

 

Je voyais mon père – que je surnommais “Papou” – s’effondrer d’épuisement, contraint par le rythme insoutenable des ouvertures matinales et fermetures tardives de son commerce. Dans ce bar de village où tout le monde se connaissait, les moindres faits et gestes des uns et des autres étaient  fréquemment sujets à plaisanterie. Nous n’échappions guère à la règle. Mon père, exténué par son rythme de travail, s’endormait fréquemment derrière le comptoir. Mes camarades d’école qui venaient régulièrement jouer au baby-foot dans la salle, riaient de lui lorsqu’il piquait du nez. J’étais ainsi devenue l’objet de leurs ignobles railleries. 

 

 

Benoît 

 

Notre père adorait ses deux filles. Il nous choyait, faisait toujours en sorte de nous combler. Puisque j’avais déjà “perdu” ma mère, je craignais qu’à lui aussi, il ne lui arrive quelque chose. Pour lui prouver que nous l’aimions, ma sœur et moi avions décidé à notre mesure de le soutenir, en nous partageant les corvées quotidiennes. De trois ans mon aînée, elle se chargea de la comptabilité et de la bonne tenue du lieu, tandis que je m’octroyai les travaux domestiques (encore un élément de ce “système d’indices”). À cette époque charnière de notre vie, nous étions devenues très autonomes et grandissions rapidement en expérience et maturité. Notre émancipation précoce avait fait naître entre notre père et nous, des liens et des schémas familiaux hors normes. Je me rappelle notamment d’un événement mémorable, qui durant des années m’a questionnée sur le lien très particulier que j’avais développé avec lui. 

 

Amoureuse d’un garçon de mon école, j’avais inscrit sur le dos de mon bracelet : “Je t’aime Benoît”. “Mon Papou” l’avait découvert et furieux, il le brandit exigeant des explications. “Que cela signifie-t-il ?” s’écria-t-il en me collant une gifle en présence de tous les clients du bar.

Ce fut la première fois qu’il levait la main sur moi. “Qu’ai-je fait de mal ? Pourquoi est-il si colérique tout à coup ?” me questionnai-je stupéfaite. 

 

(Notons ici l’indice que le prénom Benoît est également celui du père de Jenaël.)

 

J’ai mis longtemps avant de comprendre l’importance de cet incident, parmi ceux tout aussi significatifs, qui ont jalonné ma jeunesse. Cette gifle humiliante était restée gravée dans ma mémoire. Elle représentait la preuve que des sentiments éprouvés dans des vies “passées” pouvaient rejaillir dans notre présent et constituait un nouvel indice dans ma trame karmique.

 

Quelques mois plus tard, ma mère fit parvenir de ses nouvelles à mon père. Celui-ci nous expliqua laconiquement qu’elle nous avait quittés, car elle en avait assez de cette vie, qu’elle éprouvait le besoin de prendre le large et qu’elle se portait bien grâce à son nouveau travail. Finalement, un an après son départ, elle réapparut dans notre vie et nous donna la véritable raison de son éloignement. Tombée amoureuse de mon père à l’âge de 16 ans, elle avait profité de s’affranchir de l’autorité de ses parents en s’enfuyant avec lui. L’ironie du sort l’avait conduite à retourner vivre dans sa ville natale, dans un logement appartenant à ses parents qui venait de se libérer juste à côté de chez eux... 

 

Heureuse de nos retrouvailles, elle nous proposa de venir habiter avec elle. Mais pour ma sœur et moi, il était inconcevable de laisser l’un de nos parents seul. L’unique alternative fut de nous séparer pour vivre chacune par alternance chez l’un ou l’autre des parents. Ma grande sœur ayant choisi de vivre avec notre mère, je suis restée auprès de mon père.

 

À partir de ce moment-là, nos contraintes journalières pour maintenir le commerce ont commencé à peser sérieusement. Mon père avait de plus en plus de mal à encaisser son nouveau rythme de vie. Très proche de lui, sa souffrance m’était intolérable, d’autant plus que son épouse lui manquait cruellement. Il se réfugia alors tant bien que mal dans un rôle de “papa poule protecteur” tandis que je reprenais le rôle de ménagère, laissé vacant par ma mère. 

 

Subitement extirpée de mon enfance, étais-je alors devenue la maîtresse de maison ? À 10 ans, j’étais propulsée dans un nouveau rôle, celui de femme au foyer. (Voilà un nouvel indice du puzzle karmique !)

 

Je relate ici les points clés de mon enfance. Bien évidemment, à cet âge-là, je n’avais encore aucune conscience du jeu karmique qui se déroulait et encore moins que mon âme “m’obligeait” à rejouer ces rôles, pour une raison bien précise. Ces circonstances pesantes révélaient une toute autre réalité qui, à l’évidence à l’époque, me dépassait complètement. Et cela également, je ne le compris que bien plus tard.

 

 

Des événements très bizarres

 

En cette même période, des événements très bizarres se produisirent dans l’appartement que nous occupions au-dessus du bar. Cette maison de village plusieurs fois rénovée, avait été construite il y a plus de 200 ans. 

Nous étions souvent réveillés la nuit par des bruits de pas, de vaisselles et de casseroles. Notre petit chien, d’un caractère très discret, se comportait parfois curieusement. En pleine nuit, il passait de longs moments à aboyer contre un mur dans la chambre de mon père ou alors, courait à en perdre haleine en grognant après quelque chose d’invisible. À l’évidence, notre chien percevait ce qu’il nous était impossible de voir avec nos yeux. À d’autres moments, des appareils électroménagers se mettaient en route sans raison. Dans une autre pièce de la maison, des bouts de tapisserie se déchiraient mystérieusement du mur, un peu plus chaque jour. Je me sentais constamment épiée, au point d’avoir peur de monter toute seule à l’étage et m’enfermais à double tour lorsque j’allais aux toilettes.

 

Ces événements insolites ont ainsi perduré pendant plusieurs mois, jusqu’au jour où mon père décida de faire intervenir un marabout. Celui-ci nous informa qu’une âme errante logeait dans la maison et que nous n’avions pas à en avoir peur. Il suffisait d’accepter sa compagnie, de la reconnaître et ne plus vouloir la chasser. Nous pouvions même lui parler, chose que je fis alors en m’amusant avec elle. 

 

Ayant compris que je n’avais plus à craindre sa présence, les manifestations étranges se sont estompées au fur et à mesure. Quelque chose venait de s’ouvrir en ma conscience. De nouvelles conceptions de la réalité s’offrirent progressivement à moi. Même si je m’en doutais déjà, j’avais la confirmation de l’existence d’autres dimensions, bien qu’elles ne soient pas toujours perceptibles à nos sens humains. C’est ainsi qu’à l’époque, je compris que ces autres mondes se révélaient uniquement lorsque nous acceptions d’ouvrir notre esprit à leur existence. 

 

La reconnaissance et l’acceptation de cette entité furent les clés du travail chamanique que je commençais à appliquer innocemment et naïvement à cet âge-là et qui continue depuis...

 

 

Chez ma mère

 

L’année suivante, puisque nous avions “échangé nos vies”, ma sœur revint vivre avec mon père tandis que je m’installai chez ma mère. Mon regard sur celle-ci avait totalement changé depuis notre dernière séparation. Nos premiers moments ensemble furent assez déroutants. De caractère indomptable, je ne supportais ni son autorité, ni son manque de discernement envers moi et encore moins le ton employé lorsqu’elle tentait de me sermonner. Ses sautes d’humeur sonnaient faux et ne collaient absolument pas avec le personnage qu’elle essayait de se construire. Naturellement, cette tension permanente entre nos deux statuts de “femmes” engendra de nombreuses disputes. J’explosais de colère lorsqu’elle me donnait des ordres. Ayant fait mes preuves chez mon père, mon statut d’enfant devenait obsolète. (Notons ici ces nouveaux indices.)

 

Au fil du temps, notre binôme avait néanmoins évolué vers plus de conciliation et d’apaisement. Nous nous étions apprivoisées, avions appris à nous connaître et étions même devenues complices. Peu à peu, ma mère ayant compris qu’il était inutile de me commander, notre relation ne s’en porta que mieux. J’avais donc retrouvé ma liberté et mon autonomie. Comme deux adolescentes, nous nous confiions de plus en plus facilement l’une à l’autre. Ainsi, durant les périodes où je vécus chez elle, je devins très observatrice de son comportement, car j’étais de plus en plus intriguée par son immaturité. J’épiais alors ses moindres faits et gestes, essayant de comprendre pourquoi elle se conduisait comme une adolescente. Elle était devenue l’objet de ma curiosité et en même temps, je devenais son soutien psychologique, sa confidente. 

 

Une scène bien précise révèle ici toute son importance. Ma mère me confiant ses aventures amoureuses, je lui donnais des conseils avisés sur ses relations sentimentales, déjà du haut de mes 11 ans ! “Mais d’où détenais-je les réponses à cet âge-là ?!” Étonnée de moi-même, je m’étais longuement questionnée à ce sujet. Bien sûr, à l’époque, je n’avais pas encore vraiment conscience que je “jouais” à l’envers dans ce monde à l’envers. D’autant plus que, de par ma maturité avancée, je recherchais toujours la compagnie de personnes plus âgées et plus mûres que moi. Je ressentais que mon comportement singulier pour une fille de mon âge, présageait quelque chose “d’inhabituel”. 

(Dans les situations incongrues de “mon enfance”, mon âme me guida très tôt à tracer mon propre chemin de vie.)

 

Une autre fois, en vacances chez ma mère, je la surpris avec ma sœur en train de comploter. Et comme j’étais désireuse de participer à leur monde d’adultes, je leur demandai de me livrer leur secret. Elles me confièrent qu’elles allaient régulièrement et à mon insu danser. Je les menaçai alors de les dénoncer à “mon Papou”

 

 

La Nuit des Temps 

 

C’est ainsi qu’elles m’amenèrent pour la première fois dans une discothèque ouverte le dimanche après-midi. Heureuse d’explorer leur univers, je découvris l’enseigne de l’établissement avec effroi : La Nuit des Temps. Prise d’un accès de panique, je ne pus retenir mes urines. Inconsciemment, je savais ce qui se tramait véritablement derrière ces murs. 

(Cet événement fit lui aussi partie du “système d’indices” en lien avec les fonctions occultes des discothèques, qui me furent révélées récemment.)

 

Durant mon adolescence lorsque j’habitais avec elle, ma mère était devenue le sujet de prédilection de mon esprit vivace et curieux. Je l’ai connue en longue dépression. La vie ne lui faisait pas de cadeaux. Toujours “en mode survie”, elle avait peur de tout, du manque, de ses parents, des serpents, des hommes, de se perdre en voiture…, mais sa peur la plus profonde était de mourir. Elle était persuadée qu’elle allait mourir à 40 ans et redoutait d’atteindre cet âge fatidique. Lors de ses moments d’angoisse, elle me demandait : “Seras-tu là pour me tenir la main au moment de ma mort ?”

 

Son questionnement me déconcertait ! L’appel au secours de son âme était si intense qu’il m’était impossible de faire la sourde oreille. Il m’était insupportable qu’elle ne se sente pas en sécurité. En attendant de découvrir le mystère de son comportement, je me devais donc de la protéger. Je passais ainsi mon temps à la rassurer puisque bien profondément tapie dans mon inconscient, la peur de la perdre une nouvelle fois, me hantait. Durant longtemps, je me suis questionnée sur ses curieuses attitudes. L’impression qu’elle était plus immature que moi me décontenançait fortement. Une étrange et tenace sensation de la connaître “comme si je l’avais moi-même mise au monde”, m’habitait. Étais-je en train de délirer ?! 

 

Lorsque je faisais part de mes questionnements à “mon Papou”, étonnamment, il me parlait d’elle de la même manière. Nous nous sentions tous deux responsables de l’avenir de notre chère Cathy.

 

Autour de moi, planait une curieuse impression, mais je n’en comprenais toujours pas le sens. Quelque chose demandait à être dévoilé, mais de quoi s’agissait-il ? Il me manquait des éléments du puzzle pour voir clairement ce qui se jouait devant mes yeux. 

 

Assurément, à cette époque, la sagesse me faisait encore défaut pour accepter d’ouvrir l’horizon de ma conscience à de nouveaux principes qui régissent les cycles de la vie. Ainsi, l’origine des profondes phobies de ma mère m’échappa longtemps. C’est d’ailleurs en me questionnant à ce sujet que l’idée me vint de devenir thérapeute. Cette aspiration intime à vouloir aider autrui, avait même orienté mes études. J’ambitionnais de soigner les souffrances psychiques des gens, mais pour cela il me fallait d’abord comprendre leur fonctionnement. “Pourquoi tant de souffrance et de déni parmi les humains ?” m’interrogeais‑je dès mon adolescence.

 

Dans leur quotidien, tous mes proches et amis semblaient souffrir, souvent même en silence. Moi aussi je souffrais, mais d’impuissance à ne pouvoir les aider. Mon équilibre psychique et émotionnel était mis à rude épreuve. Fort heureusement, mon âme m’accordait des moments de répit pendant mon sommeil. Ma conscience s’offrait ainsi des voyages dans d’autres univers, où je retrouvais quiétude et ressourcement. Il m’arrivait même durant la nuit de sortir de mon corps. J’avais conscience de ce processus et me réjouissais d’aller me coucher. De temps à autre, “je” survolais la petite ville où nous vivions et errais au-dessus des voitures. J’observais les gens sur les terrasses des cafés, les habitants lorsqu’ils dormaient... J’avais l’aisance d’aller n’importe où, et ces expériences m’étaient devenues très plaisantes. Au moment où ma conscience réintégrait le corps, je ressentais souvent et très nettement ce petit choc qui m’était devenu familier. La sensation de retomber de quelques centimètres de hauteur dans mon lit, me signalait ainsi le retour de mon âme dans mon incarnation et la triste réalité de mon quotidien.

 

De temps en temps, pour retrouver plus de répit, je partais me retrancher chez mon père. Mon impuissance à aider mes proches devenait intolérable. Les allées et venues chez l’un et l’autre se sont prolongées ainsi durant quelques années. Mon père ayant finalement réussi à vendre son commerce, s’installa dans l’Hérault, lui aussi à proximité de sa propre famille. Prenant mon rôle de maîtresse de maison très au sérieux, j’étais toujours très proche de lui. Il m’accordait beaucoup d’attention et j’avais toujours mon mot à dire. De son côté, il ne prenait jamais de décision importante sans me consulter. Je lui concédais beaucoup de sagesse puisque, comme moi, il désirait œuvrer pour soulager la souffrance d’autrui. 

 

Sensible à l’univers ésotérique et paranormal, il m’achetait des livres traitant du sujet. Un jour, il m’offrit un jeu de cartes prémonitoire que j’utilisais avec tellement de perspicacité, que je finis par prendre peur des prédictions qui se réalisaient presque toujours. Mon père m’expliquait aussi qu’en apposant nos mains, il était possible d’apaiser les souffrances d’une personne. J’avais la forte sensation de connaître déjà cette façon de procéder ! D’où “mon Papou” détenait-il ce savoir ?

 

Un sentiment très intense me reliait à lui. J’étais passionnée lorsque nous partagions des moments en “philosophant sur le monde”, qui parfois me propulsaient dans d’autres réalités. La nette impression d’avoir vécu avec lui, de le connaître d’ailleurs, s’intensifiait de plus en plus.

 

Nous étions si proches que lorsqu’il rencontrait une compagne potentielle, il me demandait toujours mon approbation pour s’engager dans une relation plus sérieuse. Étrangement, je faisais de même ! Même si je n’en faisais qu’à ma tête, j’avais besoin de son consentement à chaque fois que se profilait une décision importante à prendre. Mais je me débrouillais toujours pour obtenir son aval afin de me déculpabiliser de prendre mon envol. À ce propos et étonnamment, après ma mère, les compagnes successives de mon père se prénommèrent “Cathy”. Avait-il pris un abonnement ?

 

(Effectivement, il y avait ici un indice de sa trame karmique qui, de plus, recoupait la mienne.)

 

Quelque temps plus tard, mon père à peu près libéré de ses sentiments inavoués envers ma mère, commença à se reconstruire. Il rencontra une nouvelle compagne qui semblait lui redonner confiance en la vie. Je décidai alors de repartir vivre auprès de ma mère, qui elle aussi avait refait sa vie. Tous deux en sécurité avec leur nouveau compagnon, je n’avais plus de raison de m’inquiéter pour eux et ne voyais plus l’utilité de devenir thérapeute. Portée par l’envie de développer ma créativité, je m’étais alors orientée vers une école de coiffure. À cette époque, vers l’âge de 16 ans, je trimais comme une forcenée près de 60 heures par semaine, et afin d’évacuer mon stress, j’allais danser les week-ends avec mes amis.

 

 

Les blouses blanches 

 

Un soir, en discothèque, sur la piste de danse, mes yeux furent attirés par la lumière saccadée d’un stroboscope. Brusquement, mon corps se raidit et se tétanisa. Comme ce fut le cas à La Nuit des Temps, je m’urinai dessus. Les mouvements ondulatoires et rapides de la lumière intermittente provoquèrent dans mon corps de violentes et incontrôlables convulsions. Une puissante décharge électrique traversa mon cerveau et me fit perdre connaissance.

 

 

Mon retour à la conscience fut tout aussi brutal. Lorsque j’ouvris les yeux, je vis des individus en blouses blanches se pencher au-dessus de mon corps pour l’ausculter. En une fraction de seconde, les questions affluèrent en mon esprit : “Qui étaient-ils ? Où étais-je ?” 

 

Une panique irrépressible s’empara de tout mon être. Allongée sur un brancard dans un couloir d’hôpital, mes jambes se mirent à claquer violemment. Une angoisse tenace me gagnait tandis que je hurlais de peur. Je refusais que “quelqu’un en blouse blanche” touche à mon corps sans mon consentement ! Les médecins tentèrent de me rassurer et m’informèrent que j’avais été victime d’une crise d’épilepsie. Néanmoins, une perte de connaissance inhabituellement prolongée de plusieurs heures les avait apparemment laissés perplexes.

 

La vue de tous ces personnages en blouses blanches penchés au-dessus de moi, semblait m’évoquer quelque chose. Étais-je en train de devenir folle ? Était-ce ma mémoire qui me jouait des tours ou existait-il quelque chose d’autre derrière les apparences ? J’avais beau fouiller, rien n’émergeait de mes souvenirs !

 

Des “médecins” s’étaient effectivement penchés sur mon corps à plusieurs reprises durant mon adolescence, mais cela se déroulait souvent lors de supposés rêves. 

 

Mais à ce moment-là, dans ma supposée réalité, ces médecins à l’hôpital, étaient-ils réellement humains ? Bien plus tard, en faisant des recherches sur internet, je découvris des témoignages de plusieurs personnes ayant eu comme moi des malaises épileptiques en discothèque (dus aux lumières stroboscopiques) mais qui, elles, se sont réveillées pendant leurs crises. Certaines rapportèrent s’être vues dans une grande salle de couleur pâle et uniforme en présence de médecins, mais non humains !

 

(Mes mictions incontrôlées, lorsque pour la première fois j’allai avec ma mère et ma sœur en discothèque et celle de ce jour-là pendant la crise d’épilepsie, corroboreraient-elles aussi le “système d’indices”?)

 

 

Aujourd’hui, je sais que les discothèques sont des lieux de prédilection utilisés par des entités transdimensionnelles pour procéder à des programmations ou enlèvements psychiques (enlèvement de l’âme). Le nom de la discothèque La Nuit des Temps, aurait-il déclenché dans mon subconscient un quelconque rapport avec les maîtres du temps, ces fameuses entités qui voyagent dans l’espace-temps ? Peut-être serait-ce aussi parce que c’est la nuit, pendant mon sommeil, qu’à plusieurs reprises se sont produites mes rencontres ?

 

 

Mal-être 

 

La semaine après cet incident, ayant repris mon travail au salon de coiffure, je vis apparaître sur mes jambes des plaques rouges et rondes et mon visage se mettre à enfler. D’après mon médecin de famille, je développais une allergie déclenchée par les produits cosmétiques utilisés dans la coiffure.  Mais je sentais en mes tréfonds qu’il s’agissait de bien autre chose. Je somatisais mon mal-être, d’autant plus que la crise d’épilepsie et l’apparition de ces “pseudo-médecins en blouses blanches”, avaient laissé une sorte d’empreinte indélébile dans mon inconscient. Je comprenais que mon corps réagissait à certains stimuli que mon intellect était incapable d’identifier. De quoi mes allergies qui s’amplifiaient, étaient-elles indicatrices ? Je pris alors la décision salutaire d’abandonner le monde de la coiffure. Ainsi, je me libérai de ce travail de forcené qui empiétait sérieusement sur ma personnalité et ma liberté d’être.

 

À partir de ce moment, de nouveaux horizons s’offrirent à moi. Expérimentant de nombreux "petits boulots", je quittai la maison familiale et travaillai sans relâche, pour ne pas succomber à la peur du manque d’argent. D’un tempérament très précoce, j’avais une inextinguible soif de vivre. Il me fallait expérimenter la vie à travers mes relations amicales et sentimentales pour apprendre et comprendre. J’endurais les blessures de l’âme que sont la trahison, la séparation, l’humiliation, le rejet, la dévalorisation, l’injustice… Au fur et à mesure, révoltée par mes expériences de vie, je touchais de profondes colères et revenais au même questionnement : “Pourquoi les gens craignent-ils autant d’ouvrir leur cœur ?” 

 

Perméable à la souffrance de mes proches, ma sensibilité et mon émotionnel étaient poussés à leur paroxysme. Combien de fois ai-je supplié, en larmes, de quitter ce monde si violent et brutal dans lequel j’étais incomprise. “Qui suis-je ? Où est donc ma place ?” me demandais-je sans cesse. 

 

Ce profond mal-être me donnait l’impression d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête, tandis que mon insatiable soif de vivre, outrepassait toutes mes limitations et mes peurs. Il était évident que j’étais simplement en quête d’amour et de vérité. Mon empathie immodérée envers autrui, préparait le terreau de mes premières crises d’angoisse.  

 

 

San Francisco 

 

Devenue femme, je me sentais toujours différente des autres. J’avais une sensibilité accrue, un sens de l’observation bien affûté et une mémoire à toute épreuve. À 19 ans, épuisée par un intarissable besoin de comprendre le fonctionnement humain et surtout, lasse de chercher ma place dans ce monde, je quittai la France pour m’installer à San Francisco aux USA. L’interdépendance entretenue avec ma mère devait cesser. Il était temps d’expérimenter mon autonomie et d’observer comment la vie pouvait se dérouler loin de ma famille. Une amie, qui m’y avait précédée, m’avait dégoté un emploi de nourrice. Les parents du bébé dont j’eus la garde me proposèrent une magnifique maisonnette individuelle à occuper à ma guise. Je suivais des cours du soir pour apprendre à parler l’anglais, car je n’en bafouillais que quelques mots. Cependant, au fil des mois, mon statut d’étrangère devint de plus en plus pesant. Tous mes efforts pour apprendre cette langue furent vains. De plus, j’avais très peu l’occasion de voir mon amie qui était très occupée dans sa nouvelle vie.

 

 

De temps en temps, rongée par la solitude et le mal du pays, je m’autorisais un saut au quartier français où j’y avais déniché une petite librairie qui proposait quelques ouvrages dans ma langue natale. M’intéressant de plus en plus à l’ésotérisme, aux mystères des NDE, de l’après-vie, des synchronicités, etc., je me procurai entre autres La Prophétie des Andes de James Redfield. 

 

Un soir, alors que je visionnais une émission à la télévision américaine dont je ne comprenais absolument rien, je me suis mise à pleurer. Me sentant étrangère à ce monde, je demandai à ce que l’on me vienne en aide. Je suis allée me coucher avec ce livre en guise de réconfort. Il représentait pour moi un enseignement qui m’était familier. Aussi, avant de m’endormir, je réitérai ma demande : “Si quelqu’un m’entend, venez-moi en aide !”

 

Durant mon sommeil, j’eus l’impression très nette d’une présence venue me rendre visite dans mon “rêve”. Pendant un long moment, je ressentis une énergie très douce et très aimante m’envelopper. Qui était-ce ? Peu importe, je trouvais beaucoup de réconfort dans ces bras puissants. Il s’agissait donc certainement de l’énergie d’un homme. Cette force enveloppante enivrait tout mon être. Elle me transmit tellement d’amour que pareillement, je commençai à enlacer son corps avec beaucoup de tendresse. “C’était si bon d’être dans ses bras”, pensai-je dans mon “rêve”. Je réalisai subitement qu’il était impossible qu’il y ait qui que ce soit dans mon lit et fus prise de panique. Me réveillant, je me surpris les bras en l’air en dehors des couvertures, l’enlaçant tendrement, mais “il” avait disparu. 

 

Quelque temps après cette mystérieuse “rencontre”, il m’arriva une expérience encore plus stupéfiante. Retrouvant un ami venu de France me rendre visite, j’étais heureuse de lui montrer mon nouvel environnement. J’avais prévu de prendre les transports en commun pour l’emmener visiter la ville, et montant dans le bus en premier, j’insérai un dollar dans la machine automatique pour payer mon trajet. Mais lorsque je me dirigeai vers l’arrière du bus et au moment même où je levai les yeux pour repérer les places inoccupées, je faillis avoir une syncope découvrant avec effroi que la plupart des occupants n’étaient pas humains ! Quasiment tous possédaient des formes humanoïdes parfois difformes, mais portaient des vêtements ! Je me rappelle notamment d’une espèce de géant ressemblant à un Bigfoot avec un tee-shirt.

 

Prise d’une terreur indéfinissable, j’attrapai le bras de mon ami, et hurlai de toutes mes forces l’implorant de descendre du bus. Ne comprenant pas la raison de ma crise soudaine, il essaya tant bien que mal de me calmer. Le chauffeur, déconcerté, stoppa le bus pour nous laisser sortir. J’étais paniquée ! Comment expliquer ce que je venais de voir ? Personne n’aurait pu me comprendre ! Fort heureusement, mon ami semblait conciliant et m’expliqua que lui aussi avait déjà vécu des phénomènes qu’il ne pouvait pas partager avec tout le monde.

 

En arrivant à la maison, encore sous le choc de cette vision, j’ouvris la fenêtre du salon. Une magnifique colombe d’une blancheur immaculée pénétra dans la pièce, faillit se poser sur l’épaule de mon ami, puis s’en retourna d’où elle était venue. “Waouh, quelle grâce !” pensai-je. Quel cadeau venais-je de recevoir ! J’éprouvai de cette visite un apaisement immédiat. Quelque chose venait de se produire et j’en ressentais les effets. J’interprétai cet événement comme un don du ciel, un signe que la Vie conspirait en ma faveur et que je ne devais plus nourrir mes craintes.  

 

 

Retour en France 

 

Cette étrange et troublante expérience précipita tout de même mon retour en France. Revenue au pays et alors que je commençais à oublier mes mésaventures aux États-Unis grâce à un nouveau travail en force de vente, je me remis à faire d’importantes crises d’angoisse. Mais cette fois, ce n’était plus ce que je voyais qui me faisait peur, mais plutôt des énergies que je ressentais ! Certaines personnes m’effrayaient ! Je compris rapidement que je captais leurs états émotionnels et entendais leurs pensées. Dès qu’elles entraient dans mon champ d’énergie, je percevais ce qui se passait dans leur psyché. Je me sentais dans une insécurité permanente et nul ne comprenait mon malaise. 

 

Totalement incomprise de mon entourage, j’avais vraiment l’impression d’être une extraterrestre débarquée sur Terre ! Le seul moyen que j’avais trouvé pour réprimer ce cauchemar, était de me fourrer tout au fond de mon lit dans l’obscurité totale et surtout, m’éloigner de tout individu. Mes crises d’angoisse, prenant de plus en plus d’ampleur, je dus cesser d’aller travailler. De plus, je remarquais que “bosser dans ce milieu de requins” ne me correspondait absolument pas et renforçait mon mal-être. Prendre la voiture pour me rendre au travail relevait d’un véritable challenge. J’étais tellement prise de panique que je craignais de provoquer un accident. Mon malaise grandissant, la peur de sombrer dans la folie me submergeait et personne ne pouvait me venir en aide. Étais-je déséquilibrée ? Étais-je en train de glisser dans la démence ?

 

Percer ce qui se tramait dans l’invisible, me terrorisait. J’avais l’impression que les jours se transformaient en semaine, tant ma souffrance semblait étirer le temps. Mon profond mal-être m’empêchait à ce moment-là d’être une jeune femme épanouie et heureuse, et a priori rien ne pouvait l’endiguer. J’étais infiniment seule. Cette forme d’agoraphobie mélangée à ma crainte pathologique des gens me tétanisait. J’avais terriblement peur de ne pouvoir réellement m’insérer dans la société. J’en avais ras-le-bol d’être différente ! Mes chances de devenir enfin “normale” s’amenuisaient de jour en jour, mais ce qui m’insupportait le plus était de me sentir incomprise.

 

Je voyais ma sœur qui occupait un emploi dans la même entreprise depuis plus de dix ans et moi, l’abeille qui butinait à chaque fleur, je cherchais inlassablement ma place quelque part en ce bas monde. Ma sœur me paraissait si stable et équilibrée dans sa vie. Comment avait-elle réussi à se libérer de nos souffrances vécues durant l’enfance ? Il me fallait à tout prix me prouver que moi aussi, j’en étais capable.

 

Mes angoisses durèrent plusieurs mois, jusqu’au jour où je me suis décidée à aller voir mon médecin. Je redoutais tellement d’être prise pour une folle que je m’en étais privée jusque-là. En exprimant mon mal-être, je m’étais autorisée à éclater en sanglots. Très à l’écoute, il m’avait rassurée, m’expliquant simplement que je faisais de l’hypersensibilité et de l’hyperempathie et qu’avec des comprimés à base de plantes, tout devrait rentrer dans l’ordre. 

 

 

Un charmant jeune homme 

 

Le fait que ma souffrance ait été entendue m’avait fait grand bien. Il était enfin temps de me sentir sécurisée ! Il me semblait avoir compris comment ne plus ressentir ce profond mal-être. Faire comme tout le monde, trouver un travail stable et me mettre en couple, devenait désormais le moteur et le remède de ma vie. Pendant un temps, du moins, je m’efforçais d’y croire…

 

C’est ainsi que je rencontrai un charmant jeune homme. À peine nos yeux se croisèrent, que mon cœur s’emballa. Je me sentis attachée à lui, comme si un fil invisible nous reliait. Aussi, le désir de m’établir avec lui dans une relation sérieuse, grandissait de jour en jour. Comme à l’accoutumée, je décidai d’en informer mon père pour lui partager ma joie. Mais ce jour-là, une nouvelle fois, les choses dérapèrent ! Nos âmes avaient décidé qu’il était grand temps que je perçoive le jeu qui se tramait entre nous. Cette fois-ci, mon nouvel ami ne convenait absolument pas à “mon Papou” qui décréta que, de culture maghrébine, il risquait de devenir beaucoup trop influent dans ma vie et qu’il tenterait certainement de me détourner de mon chemin. Il m’ordonna immédiatement de mettre un terme à cette relation.

 

Décontenancée par ses propos et rejetant violemment sa sommation, je le défiai. Il s’opposa de plus belle et me menaça sèchement : “Il va falloir que tu prennes une décision ! Ou c’est lui, ou c’est moi !”

 

Ses mots me figèrent sur place ! Incapable d’accepter son intransigeance et sentant la colère de l’injustice déborder de tout mon être, je lui renvoyai en pleine face : “Non mais...! Depuis quand, toi et moi couchons ensemble ?! En aucune façon, je n’ai à faire un choix entre toi et lui. Il est mon amoureux et toi, je te le rappelle, tu n’es que mon père !”

 

Bouleversé par ma réponse, il réalisa brusquement le sens de ses propos. Incapable de justifier pourquoi il m’avait dit une chose pareille, il se confondit en excuses. À ce moment-là, je ressentis une profonde déchirure entre nous deux. Quelque chose d’impalpable et d’invisible venait de se rompre en moi. J’avais l’étrange sensation de l’avoir trahi et trompé. Dorénavant, la moindre contrariété entre nous, rouvrait ma blessure et il me devenait insupportable de m’opposer à cet homme que j’aimais tant. Je n’avais plus qu’une envie : mettre fin à mes jours ! Je réalisai une nouvelle fois que je redoutais de perdre celui que je nommais “mon Papou”.

 

C’est alors que l’épisode du “bracelet de Benoît” me revint en mémoire. Mon instinct, une nouvelle fois, me disait que quelque chose se tramait dans la relation avec mon père. Mais quoi ? Tout comme avec ma mère, quand elle me priait de lui tenir la main lorsque la peur de mourir la submergeait, j’avais encore une fois l’étrange sentiment d’un déjà-vu. Mais que voulait donc me montrer mon âme ? 

Ce questionnement me tourmenta durant de nombreuses années, mais ce n’est que plus tardivement que j’en découvris la raison.

 

Finalement, en aucune façon, je ne me suis pliée au “chantage affectif” de mon père. Je n’étais pas d’accord de laisser qui que ce soit décider de ce qui est bon ou mauvais pour moi. Ce lien d’attachement vis-à-vis de mon père, en partie rompu, favorisa mon émancipation. Décidant d’expérimenter pleinement ma vie, je partis donc à Lyon vivre avec mon compagnon, malgré les semonces de mon père.

 

Ma relation sentimentale dura trois années et effectivement nos différences culturelles eurent peu à peu raison de notre couple. Devenue réactive et rebelle, il m’était impossible de me plier à ses croyances idéologiques. Et rester cantonnée dans ce rôle de femme au foyer, comme le voulait ses traditions familiales, empiétait sur ma liberté d’être. Je pressentais profondément que quelque chose d’autre m’attendait. Je réalisai brusquement qu’une part de moi reproduisait mécaniquement les mêmes schémas que lorsque je vivais avec “mon Papou” ! Évidemment, “mon Papou” n’était pas mon époux, mais “mon papa”, mon père ! Comment ne m’en étais-je pas aperçue plus tôt ?!

 

 

Retour à la case départ 

 

À 25 ans, après toutes ces pérégrinations, retour à la case départ ! Je décidai de revenir vivre dans le Vaucluse auprès des miens. Libérée de l’oppression de mon ex-compagnon, j’étais contente de retrouver la complicité avec ma mère, d’autant plus que l’appartement au-dessus de chez elle, que j’occupais il y a trois ans, venait tout juste de se libérer. Mais je savais pertinemment que cette fois-ci, rien ni personne ne pourrait me faire quitter le pays sans que je comprenne les raisons de toutes ces années de fuite et de quête. Peu de temps après, je trouvai un emploi stable, puis rencontrai un nouveau compagnon, Hervé. Toutefois, de nouvelles difficultés changèrent encore une fois ma destinée ! De fortes douleurs pelviennes commencèrent à me faire terriblement souffrir. Mon médecin m’annonça que j’étais atteinte d’une maladie nommée “endométriose”. Une maladie ?! 

 

Encore une fois, mes nouveaux projets de vie s’effondrèrent ! J’en fus totalement bouleversée ! Comment “moi”, toujours à l’écoute des autres, toujours pétillante malgré les difficultés, avais-je pu développer une maladie ? Ce mot résonna en mon esprit telle une alarme stridente ! Cela me paraissait invraisemblable. Déjà consciente à cette époque de la signification symbolique du mot “maladie”, je savais qu’elle se rapportait au “mal‑a‑dit” mais signifiait également “l’âme‑a‑dit”. 

 

Sourde aux innombrables appels de mon âme, mon corps avait pris le relais pour exprimer mon mal‑être refoulé. J’avais donc entamé de nombreuses recherches pour en découvrir la cause. L’orientation vers la médecine alternative me paraissait plus appropriée pour trouver des réponses. Je redécouvris alors un nouvel univers qui me semblait déjà familier. Je savais que pour guérir, je devais découvrir l’origine de ma maladie. Ce fut l’occasion d’extraordinaires jeux de piste pour comprendre ce que mon âme avait à me dire. Évidemment, les indices me renvoyaient à mon enfance, à la relation avec mes parents, avec les hommes, au fait de ne pas pouvoir trouver ma place. Mais ils me ramenaient surtout à l’enfantement, puisque symboliquement mes organes sexuels semblaient devoir me protéger de quelque chose.

 

(Quelques années plus tard, je découvris l’histoire des Cathares et les douloureuses mémoires que je transportais de cette époque, comme celle d’avoir vu mon enfant mourir sur le bûcher. Voilà la pièce du puzzle qui manquait : l’enfant en question était Cathy, ma mère dans cette vie !)

 

Au fur et à mesure de mon cheminement, de nombreuses prises de conscience convergèrent en mon esprit, impliquant de fait une modification de mon comportement et me replongèrent dans l’envie de reprendre un cursus de thérapeute. C’est ainsi qu’en parallèle de mon travail et m’efforçant de mener une vie heureuse avec Hervé, je m’inscrivis à une formation de thérapeute en kinésiologie.

 

 

“Sois attentif aux signes”

 

Pendant ce cycle d’enseignement, je fis connaissance avec “Adèle” la formatrice qui par la suite devint mon amie, ma confidente. Ayant le don de déchiffrer l’univers des symboles et des synchronicités, elle me rappelait que toute chose, toute rencontre, tout événement pouvaient être associés à une symbolique et qu’en les enfilant telles les perles d’un collier, l’ensemble formait une conjonction d’éléments cohérents et remarquables – des synchronicités –, qui lorsqu’on parvenait à les décoder, nous guidaient dans notre vie quotidienne. C’est ainsi que je fis le rapprochement avec l’enseignement de La Prophétie des Andes qui disait “Sois attentif aux signes”. Cette fois-ci, je me lançais dans la pratique. Je commençais progressivement à percevoir le sens caché des choses et parvenais à déceler les hauts-fonds qui m’empêchaient de naviguer dans ma propre vie. J’en étais fascinée.

 

Tant bien que mal, j’alliais ma vie de couple et ma nouvelle formation en me persuadant que j’étais comblée. Hervé et moi projetions de bâtir une maison, de fonder une famille, d’avoir un bébé... Cependant, j’éprouvais toujours la sensation intime que quelque chose n’allait pas, puisqu’aucun de nos projets en commun ne parvenait à se concrétiser. Ce mal‑être refoulé depuis l’enfance semblait vouloir ressurgir à nouveau. Les questions existentielles rejaillirent dans mon esprit : “Que suis-je venue faire sur cette Terre ? Pourquoi n’étais-je toujours pas heureuse ? Pourquoi quoi que j’entreprenne, je revenais toujours au point de départ ?” 

 

Du fait que personne ne s’intéressait au plus essentiel, la vraie vie, la routine au travail devenait difficile à assumer. Je dus admettre que je m’ennuyais profondément dans mon quotidien. Posséder une belle voiture, une belle maison, accumuler toujours plus de biens matériels pour nourrir le “m’as‑tu-vu” en usage dans notre société, ne me nourrissait absolument pas. La sensation de tourner en rond me submergea à nouveau. Je me rendis compte qu’en imitant les autres, ma vie était d’une banalité déconcertante. M’efforcer de ressembler à la norme n’avait véritablement aucun sens. 

 

Peu à peu, m’enfonçant dans une profonde sensation de vide, je franchis la limite de la “grande dépression”. Les circonstances me montrèrent que j’allais encore une fois devoir changer de direction ! Cependant, je me rendis à l’évidence : malgré cette pesanteur qui s’installait dans ma vie, j’avais très peur de modifier mes habitudes et mes comportements. Confortablement installée dans mon illusion, je me raccrochais désespérément au cocon sécurisant, soigneusement tissé autour de mes peurs. J’étais persuadée que le sens profond de mon existence était enfoui quelque part en moi et que, d’une façon ou d’une autre, je m’empêchais certainement de le découvrir. Désormais, je ne voulais plus tricher en embellissant la réalité et ne supportais plus les mascarades, le déni, le mensonge, les faux-semblants, derrière lesquels je m’étais réfugiée.

 

Un beau jour, je me remis résolument en question. Brûlant de ma vérité, j’étais prête à m’ouvrir à l’essentiel : la guidance de mon âme. Dès ce moment, l’univers déclencha une succession incroyable de synchronicités, afin que je puisse m’extraire de ma routine. Cependant, mon compagnon, las de mes remises en question, refusait de changer notre illusoire mais confortable quotidien, bien qu’il lui pesait aussi. Une fois, se laissant emporter par la colère, il acta son désespoir en me collant une cinglante gifle. Geste qui finalement m’a été bénéfique pour assumer notre rupture, car tous deux refusions de sombrer dans la classique spirale de la violence conjugale. 

 

Meurtrie dans l’âme, je n’arrivais pas à me résigner de ne plus pouvoir “l’aimer”, même si au fond de moi, je savais que pour retrouver ma liberté, je devais en payer le prix. J’étais tellement choquée par cette dernière épreuve que mon médecin m’imposa un arrêt de travail prolongé qui renversa littéralement le cours de mon existence. À ce moment-là, j’ignorais encore que jamais plus je ne retournerais travailler dans ce système qui, à mes yeux, était foncièrement hypocrite et fallacieux. Cette douloureuse séparation s’avéra définitivement salutaire.

 

 

Prise de conscience salutaire

 

À partir de scrupuleuses observations et de mes multiples remises en question, je réussis au fur et à mesure de mon cheminement à percevoir ce qui m’empêchait de vivre et ce qui était la cause de mon mal‑être. J’ai douloureusement pris conscience que par peur d’être rejetée, j’avais mis en œuvre tout ce qui était en mon pouvoir pour me “fondre dans la masse” et ne plus être pointée du doigt. Et de quels regards avais-je peur ? N’était-ce pas en premier lieu de celui de mes parents ?

 

Je réalisais peu à peu que pendant longtemps, je n’avais été que l’ombre de moi-même et que mes pensées et actes avaient été orientés, puis exécutés uniquement en fonction de ce que j’avais cru que les autres attendaient de moi. À chaque pas, je réalisais que mon mode de raisonnement et de fonctionnement étaient “à l’envers” de ce que me proposait la société. Il était donc temps que je découvre ma véritable identité et la raison pour laquelle j’étais incarnée sur Terre. Ainsi, mon “propre Univers” m’offrit le “loisir” nécessaire pour parvenir à le découvrir. 

 

Au fur et à mesure de mes remises en question, je compris qu’il était nécessaire que je m’émancipe véritablement. Lorsque je m’interrogeais sur mes questions existentielles, mon âme se débrouillait par tous les moyens possibles et imaginables pour me fournir les réponses, le plus souvent par système de symboles. Ainsi, la symbolique de tout événement qui se présentait dans mon quotidien et que je pouvais relier à un événement réel et tangible, me permettait avec de plus en plus d’aisance de décoder l’information dont j’avais besoin. Je développais cette capacité à une vitesse fulgurante, m’autorisant de plus en plus à établir des rapprochements apparemment improbables, entre certaines choses et d’autres.

 

Décidant de me reprendre en main, je mis de la distance vis-à-vis de ma famille avec la conviction qu’en prenant assez de recul, je découvrirai le jeu qui se tramait au-delà des apparences. C’est ainsi que le rôle entretenu avec mon père et ma mère devint extrêmement clair ! Le lien qui nous unissait avait transcendé le temps et les incarnations. N’étions-nous pas en train de reproduire nos rôles d’antan ? Il m’a fallu vivre toutes ces expériences pour le comprendre.

 

À partir du moment où je perçus la trame karmique qui me maintenait dans ce monde, je proclamai haut et fort à l’Univers, que si je devais rencontrer quelqu’un dans ma vie, ce serait désormais une personne avec qui je cheminerai en symbiose avec ma quête et mes aspirations. 

 

Quelque temps plus tard, je rencontrai Jenaël !

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